dimanche 1 mars 2015

Extrait: De saisissantes descriptions de sentiments dans Le Roi disait que j'étais diable de Clara Dupont-Monod (2)

"Hélas, Louis me fait honte. Il est derrière moi. Il porte la cotte grise des pénitents. A ses pieds, de simples sandales. Un pèlerin. Extatique, il embrasse une petite croix de bois pendue à son cou. Son regard est d’un bleu transparent, lavé par les sermons. Je n’ose même pas imaginer le spectacle qu’il offre. Par moi, il a goûté à la haine. Par lui, j’ai découvert la honte. Quel magnifique couple nous formons ! J’aurais tant donné pour marcher à côté d’un roi. Qu’un monarque porte une couronne et un manteau d’hermine, est-ce trop demander ? Maudits soient ces abbés qui effacent les êtres ! J’avance et j’observe les réactions : admiration pour moi, effarement quand on comprend que l’ermite, c’est le roi. Parfois il tente un pas de côté pour se joindre à la foule. Les sergents le ramènent doucement vers le cortège royal. Je surprends des visages hilares. Ah, si je pouvais me retourner et fouler aux pieds ce mari incapable de tenir son rang ! Plus loin devant, les mitres étincellent. L’abbé Suger a lancé des centaines d’invitations. C’est un festival de broderies, d’orfroi, de couleurs. Même les chevaux ont des robes de brocart. Et parmi ce luxe, qui est bien la seule chose que j’apprécie en l’Eglise, il y a une erreur, mon mari." (p. 150) 

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